L’histoire des Caves Bernard-Massard est le résultat d’une rencontre pour le moins fructueuse, au début du 20e siècle, entre un œnologue à l’âme entrepreneuriale et un avocat passionné par le raisin.
Un intérêt commun qui a traversé les décennies, l’entreprise étant restée, depuis, dans le giron familial. Le groupe produit, aujourd’hui 4 millions de bouteilles et emploie quelque 250 personnes.
Le Domaine du Clos des Rochers est, historiquement, le tout premier dans l’histoire des Caves Bernard-Massard: un terrain d’une dizaine d’hectares dans l’est du pays, entre Grevenmacher et Wormeldange. Ce petit vignoble appartenait à Bernard Clasen, qui l’avait lui-même hérité de ses aïeux.
Au lendemain de la Première guerre mondiale, Jean Bernard-Massard, œnologue luxembourgeois formé dans les plus prestigieuses maisons champenoises de Reims et d’Epernay, revient au pays. Son ambition: appliquer tout son savoir-faire aux vins luxembourgeois, en élaborant des vins mousseux de qualité, selon la méthode champenoise.
Fournisseur de la Cour grand-ducale
La rencontre avec Bernard Clasen aboutit à la création de la société Caves Bernard-Massard en juillet 1921. Parmi les associés fondateurs, outre MM. Bernard-Massard et Clasen, figure une des grandes figures de la place financière luxembourgeoise, Max Lambert, un des co-fondateurs, l’année suivante, du groupe d’assurances Foyer.
Jean Bernard-Massard n’a pas vraiment le temps d’assister au développement de sa société : il disparaît prématurément en 1923, laissant l’opportunité à la famille Clasen de s’impliquer pleinement dans la gestion d’une entreprise qui, en 1931, accède au prestigieux clan des fournisseurs de la cour grand-ducale.
Les années suivant la crise économique de 1929 sont difficiles, le plus fort de la production restant un produit de luxe et, donc, assez cher. L’idée, en 1933, de produire du jus de raisin traditionnel permet à la société Bernard-Massard de trouver une planche de salut, sous la houlette de Joseph Clasen, le frère de Bernard, qui lui succède à la présidence du conseil d’administration à son décès en 1934.
Reparti de (presque) zéro
À la fin des années 1930, l’entreprise emploie environ 45 personnes, dont une majorité d’ouvriers, et produit 150.000 bouteilles de vin mousseux.
La Seconde Guerre mondiale meurtrit profondément le pays et les installations de Bernard-Massard n’échappent pas à la désolation. Il faut pratiquement repartir de zéro. En décembre 1945, Joseph Clasen décède, laissant le chantier de la reconstruction à ses fils André, qui n’a pas encore 30 ans, et Carlo, tout juste âgé de 22 ans.
Les temps restent durs jusqu’à la fin des années 50, avec des conditions extrêmement météorologiques défavorables et des coups durs qui s’enchaînent, comme en 1957 avec les décès, en quelques mois de Max Lambert et d’André Clasen.
Repositionnement
C’est donc à Carlo Clasen, alors âgé de 33 ans, d’œuvrer pour recréer la marque Bernard-Massard et à redévelopper les ventes dans ses deux marchés principaux (la Belgique et le Luxembourg), tout en modernisant les installations.
La société se redresse bien, mais connaît un nouveau coup d’arrêt avec l’éclatement de la crise sidérurgique du milieu des années 70. Hubert Clasen, le fils de Carlo, termine alors ses études de science économique et de management, et finit par rejoindre la société familiale en 1979.
C’est lui qui initie le repositionnement des vins Bernard-Massard, non plus en seul produit de luxe pour les grandes occasions, mais aussi en boisson d’apéritif. «Ensuite, il fallait faire en sorte que les gens aient toujours dans leur frigo une bouteille de vin mousseux. C’est exactement ce qui s’est passé. Nous avons profité d’un changement mondial des habitudes de consommation, auquel nous avons activement participé dans nos marchés via notre marketing qui, progressivement, a fait comprendre aux gens que notre produit était accessible au quotidien, pour tous les moments de la vie», explique Hubert Clasen.
5e génération
En 1984, une contamination au chlore due à l’utilisation de ce produit dans le traitement des éléments en bois du bâtiment de la société oblige Bernard-Massard à démolir et reconstruire presque toutes ses installations et redéfinir complètement sa façon de travailler.
Un chantier colossal et deux années de chiffres d’affaires investis pour un résultat qui permit à la société d’être porté par un nouvel élan.
Désormais dirigées par Antoine Clasen, fils d’Hubert, et représentant de la 5e génération familiale, les Caves Bernard-Massard rayonnent sur les domaines du Clos des Rochers (20 ha de vignes réparties sur les communes de Grevenmacher, Ahn et Wormeldange) et du Château de Schengen (12,5 hectares).
Retrouvez plus de détails et d’anecdotes sur l’histoire des Caves Bernard-Massard dans l’ouvrage «Histoires de Familles», édité par Maison Moderne en collaboration avec la Banque de Luxembourg: un ouvrage qui relate la saga de 10 familles d’entrepreneurs et, au travers elle, dresse un portrait original du Luxembourg.